La Suède est à juste titre réputée pour la qualité de son dialogue social. Mais cette capacité à prendre en compte l’intérêt de la collectivité ne se limiterait-elle pas au royaume de Suède ?

SVT, équivalent de France Télévision, a diffusé il y a quelque temps un reportage consacré aux activités de Telia au Népal. Pour faire court, après avoir développé et géré sa filiale népalaise Ncell pendant des années, Telia décide de s’en séparer et de quitter le pays. Problème : l’impôt sur la plus-value réalisée lors de la vente, autant qu’il existe, sera payé non au Népal, pays très pauvre où la plus-value éventuelle a été générée, mais en Norvège, pays riche qui n’a rien à voir dans l’histoire si ce n’est qu’il bénéficie du jeu d’optimisation fiscale créé par Telia. Telia s’étant certainement fait conseillé par d’innombrables expert en tout genre, nul doute que l’opération soit légale, bien que le gouvernement népalais ne partage pas ce point de vue. Mais est-elle pour autant juste ?

L’histoire me rappelle une anecdote qui remonte aux années 90. Son carnet de commandes se dégarnissant, le spécialiste de roulement a billes SKF décida d’ajuster les effectifs de son usine de Tours. Après avoir été informé de son licenciement, le salarié était invité à rejoindre immédiatement le taxi qui l’attendait à la sortie de l’usine et le déposait directement à l’agence de Pôle Emploi la plus proche !

L’affaire avait fait grand bruit dans les journaux et l’histoire en avait choqué plus d’un, en particulier du fait que ces pratiques allaient à l’encontre de l’image sociale associée aux entreprises suédoises.

Mais peut-être que ces contradictions n’en sont-elles pas. Du temps où nous habitions la région parisienne, l’un de mes voisins dirigeait la filiale française d’une société cotée dont le siège est basé à quelques dizaines de kilomètres de Göteborg. A l’occasion de ses nombreux déplacements au siège, il avait constaté que les efforts de productivité toujours croissants qu’on lui réclamait étaient loin d’être la norme en Suède. Il en avait conclu que la rentabilité maximale exigée auprès des filiales étrangères était le prix à payer pour assurer la paix sociale en Suède !